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La pizza par Pasquale Cozzolino

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 La pizza par Pasquale Cozzolino

La pizza par Pasquale Cozzolino

Le premier critère de qualité d’une bonne pizza est son aspect : elle doit présenter un aspect “tigré” avec des taches noires. La régularité de la forme ne compte pas vraiment…L’odeur doit ressembler à celle du pain frais. Et la pizza doit être légère et très aérée. Il existe énormément de pizzas à travers le monde : on oppose notamment les pizzas industrielles et très standardisées, aux pizzas dites artisanales plus irrégulières. Mais attention, la pizza n’est pas juste un bout de pain avec de la tomate dessus !

D’après moi, la pizza originale est la Napolitaine, créée et inventée à Naples. Il s’agit d’une pizza avec une recette de pâte et des ingrédients simples, une longue fermentation, 60/65% d’eau, sans ingrédient chimique, et dont la fermentation est démarrée sur levure. Quant aux pizzas romaines et siciliennes, elles ont été créées aux Etats Unis et se sont ensuite étendues au reste du monde.

En 2004, une première pizzeria napolitaine fut créée aux Etas Unis, sans grand succès. En 2008, ce fut le tour d’une deuxième, qui, elle, rencontra un réel succès ! Ce fut le début des pizzerias napolitaines, qui commencèrent à occuper le marché américain. Quand je suis arrivé aux Etats-Unis en 2011, j’ai importé deux recettes de pizzas qui n’étaient pas encore connues outre-Atlantique : la « fried pizza », encore appelée Montanara, et la Pala (une de mes créations).

La Montanara est réalisée avec la même pâte que la Napolitaine, mais frite et garnie avec de la sauce tomate et du pecorino, puis passée au four à soles, pour « sécher » l’huile. Quant à la Pala, la différence principale avec la Napolitaine est la quantité d’eau (78% pour la Pala contre 60/65% dans la Napolitaine, ce qui oblige à cuire à basse température afin que l’eau s’évapore). Dans la pizza Pala, on trouve un autre ingrédient spécifique : de l’huile d’olive vierge extra ; lorsque l’eau s’évapore lors de la cuisson, la présence d’huile permet de préserver la fraîcheur de la pâte ; c’est aussi grâce à l’huile que l’intérieur de la pâte est très moelleux, tandis que l’extérieur est bien croustillant.

Comment réaliser une bonne pizza ? D’abord avec des ingrédients simples et de qualité : selon moi, farine, sel, eau et levure (naturelle, ou de bière). Ensuite, la fermentation est un paramètre extrêmement important ; elle doit durer 24h minimum à température contrôlée. Si la fermentation se limite à 3/4h, le gluten n’est pas totalement dégradé, ce qui implique une digestibilité moins importante de la pizza. (Personnellement, je réalise même une fermentation de 48h, optimisant la digestibilité de mes pizzas ; en général, la fermentation est de 12h pour une pizza Napolitaine.)

Pour le pétrissage, il est nécessaire de s’équiper avec un pétrin permettant l’absorption d’une grande quantité d’eau par la pâte. Enfin, la cuisson est très importante ; il est préférable de cuire dans un four “feu de bois”. En bref, le pizzaiolo doit s’y connaître pour fidéliser ses clients ! Il doit par exemple pouvoir garantir la qualité de ses matières premières, la durée de sa fermentation, ...

Dans mes restaurants, au début, les clients trouvaient la pizza Napolitaine trop molle et humide ! Mais j’ai expliqué que la pizza originale était comme ça, cuite à faible température pour permettre à l’eau de rester dans la pâte, et que cette texture moelleuse permettait à l’origine de plier la pizza et de la consommer en marchant ! Humide, pas vraiment, plutôt juteuse, parce qu’elle contient de la mozzarella fraîche, riche en lait (contrairement à d’autres fromages plus pauvres…), mais aussi une sauce réalisée avec des tomates fraîches…La Napolitaine est d’ailleurs aujourd’hui considérée comme une pizza healthy, qu’on peut se permettre de déguster avec un verre de vin !

Les Etats-Unis se sont avérés un excellent terrain d’étude pour cette pizza, parce qu’on y trouve des consommateurs d’origines très diverses : elle est appréciée des américains – une fois la texture « humide » acceptée –mais également des asiatiques, des indiens, des français, et bien entendu les Italiens du Sud ! (les Italiens du Nord préfèrent les textures plus croustillantes, mais ce n’est pas réellement un frein, puisqu’en cuisant un peu plus longtemps la pizza, la texture peut devenir plus croquante….)

Bref, une pizza plébiscitée par tous !

 

Pasquale Cozzolino, Chef Executive du Ribalata, USA